RDC : Quand l’État gouverne par la douleur
La gouvernance congolaise révèle une stratégie méthodique de domination par la souffrance.

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LES POLITICIENS CONGOLAIS : ARCHITECTES DU CHAOS ET PRISONNIERS DE LEUR PROPRE HISTOIRE
La RDC est aujourd’hui synonyme de chaos, de violence et de désespoir.
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Le Nationalisme Congolais Face à l’Invasion du M23 : Résistance, Géopolitique et Enjeux Internationaux
Les Wazalendo : Un Symbole de Résistance, Mais Pas Une Solution Durable
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Le Congo en quête d’une Philosophie Nationale : Sortir du Chaos par une Vision Commune
Le Congo fait face à une crise existentielle sans précédent, mais cette crise peut devenir l’opportunité d'une véritable renaissance nationale.
- Publication Date:
23 mars 2025
- Location:
Matadi, RDC
- Research Focus:
Politique
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Equipe Editoriale Congo Archives
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À la lumière de la théorie de la « politique de la cruauté » d’Achille Mbembe, la gouvernance congolaise révèle une stratégie méthodique de domination par la souffrance.
Il y a quelques mois à Bunia, une mère a vu son fils de 8 ans traîné hors de leur maison, exécuté devant elle par des miliciens. À Beni, une adolescente a été violée par quatre hommes armés, puis abandonnée nue sur la route. À Kinshasa, des milliers font la queue à l’aube pour une ration d’eau sale. Ce n’est pas une guerre, ni une crise, ni une tragédie accidentelle. C’est un système. C’est une méthode. C’est une politique de la douleur.
Comment expliquer qu’en RDC — pays au sol le plus riche du monde — la majorité du peuple vive dans la terreur et l’indignité ? Cette question, souvent posée avec une naïveté choquante, trouve un éclairage brutal dans les travaux du philosophe camerounais Achille Mbembe et sa théorie de la politique de la cruauté. Ce concept, loin d’être une simple métaphore, permet de comprendre le fonctionnement profond d’un pouvoir qui ne cherche ni légitimité ni efficacité, mais la reproduction du chaos au service de quelques-uns.
La cruauté comme outil de gestion politique
Achille Mbembe définit la politique de la cruauté comme un mode de gouvernance où l’État exerce sa domination non pas par le droit ou la raison, mais par la violence, la peur, l’humiliation et l’appauvrissement des corps. Ce pouvoir se nourrit de la souffrance du peuple. Il crée volontairement l’instabilité, la désorganisation et la dépendance, car un peuple affamé, désespéré et fracturé est plus facile à contrôler qu’un peuple éduqué et organisé.
« Au Congo, le pouvoir ne gouverne pas les vivants pour les libérer, il administre les douleurs pour les perpétuer. »
Un habitant de Bukavu –
Le cas congolais : théâtre parfait de la souffrance programmée#
En RDC, les symptômes de cette politique sont criants :
- Des élections régulièrement truquées, qui humilient le citoyen et vident l’acte électoral de sa substance.
- Une pauvreté organisée, où la richesse du sous-sol ne profite qu’aux élites locales et étrangères.
- Une violence armée dans l’Est du pays entretenue, tolérée, parfois même instrumentalisée.
- Une infrastructure sociale défaillante (santé, éducation, justice), qui prive la population d’outils d’émancipation.
Rien de tout cela n’est accidentel. Dans la logique de la cruauté, le chaos est une stratégie. Il ne s’agit pas de gouverner pour développer, mais de gouverner pour dominer par l’épuisement.
Quand le corps devient le champ de bataille du pouvoir#
Mbembe insiste : dans les régimes de cruauté, le corps du citoyen devient l’ultime cible. En RDC, ce corps est exposé à la famine, à la maladie, à l’insécurité, à l’exil forcé. Il est aussi instrumentalisé : les enfants soldats, les femmes violées, les populations déplacées — tous sont utilisés comme moyens de terreur et de contrôle.
La souffrance n’est donc pas un dommage collatéral. Elle est au cœur de la stratégie politique.
Et maintenant ? Le choix entre rupture et répétition#
Le diagnostic est rude, mais il doit conduire à l’action. Tant que le peuple congolais reste plongé dans l’oubli, tant que l’on continue à gérer la misère plutôt qu’à l’abolir, le Congo restera le laboratoire de la cruauté moderne.
Il faut rompre. Pas réformer. Il faut juger les bourreaux, démasquer les profiteurs, nommer les assassins. Il faut que le Congo sorte de la peur et entre dans la justice. Nationaliser ses minerais, désarmer ses bourreaux, démanteler ses réseaux de prédation. Il faut que les Congolais redeviennent dangereux pour ceux qui les piétinent. Sinon, la douleur restera la seule politique disponible.
Sans cela, le pouvoir congolais continuera de gouverner par la douleur, en transformant la République en machine à produire du silence et du désespoir.